Musique gnaoua : la transe libératrice
Inscrite à l’Unesco, sur la liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité, la MUSIQUE GNAOUA est un style bien particulier dans le paysage musical, artistique et spirituel.
Gnaoua, (ou gnawa), désigne à la fois le style musical et les musiciens qui jouent ce style : il s’agit d’une musique, présente notamment au Maroc, d’origine d’Afrique sub-saharienne, dans laquelle la transe joue un rôle très important. Les gnaouas sont, dès la fin du XIX siècle, identifiés comme une confrérie religieuse populaire dont les pratiques thérapeutiques seraient l’héritage de cultes mystiques subsahariens transmis par des générations de subsahariens musulmans installés au Maghreb. La musique gnaoua est caractérisée pas ses rythmes, ses sonorités, ses répétitions, mais aussi ses couleurs, ses tenues et ses danses. Elle est ponctuée de rituels et de traditions, et ouvre des expériences d’états modifiés de conscience entrainant la libération de blocages intérieures. Découvrons comment cette musique est susceptible de nous aider à retrouver des potentiels inhibés.
LA MUSIQUE GNAWA, C’EST QUOI?
3 HEURES DE MUSIQUE TRADITIONNELLE GNAWA
LES INSTRUMENT DE MUSIQUE DE LA MUSIQUE GNAOUA
1 ) Présentation de la musique gnaoua
FESTIVAL DE MUSIQUE GNAWA D’ESSAOUIRA : Au Maroc, la musique gnaoua est présente un peu partout dans le pays, mais c’est à Essaouira où à lieu le festival du même nom que chaque année la musique gnawa retentit à tous les coins de rues. Grâce à ce festival, la notoriété musicale de la musique gnaoua s’amplifie.
LES FEMMES ET LA MUSIQUE GNAOUA : Dans la musique gnawa principalement joué par des hommes, le gnawa au féminin tend à prendre sa place progressivement. Initiée très jeune au gembri, Asma El Hamzaoui, fille du célèbre mâalem Rachid Hamzaoui, est l’une des très rares mâalem femme. Son groupe, Bnat Timbouktou, entièrement féminin, opère une révolution dans les consciences et dans le monde de la musique gnawa marocaine.
ETYMOLOGIE : Selon Delafosse, l’expression berbère » akal-n-iguinaouen » signifiant « pays des Noirs », aurait donné naissance aux mots Guinée et Ghana et par la suite au mot « gnaoua » par ressemblance phonétique. Gnaoua, signifierait, par extension, « homme noir » ou « venant du pays des hommes noirs », c’est-à-dire d’Afrique subsaharienne.
RITUELS : Accompagné de qraqeb (castagnettes en métal) et d’un gros tambour, le guembri est joué par le mâalem (le maître). La musique guide la transe des adeptes lors de rituels nocturnes appelés lila mêlant la fête (koyyou) et l’action thérapeutique (mlouk). Accompagné de voyantes-thérapeutes (chouwafate) et de médiums, ils pratiquent ensemble un rite de possession syncrétique. Musiques et intentions dirigées visent à évacuer les divers maux dont souffre l’adepte concerné. La M’hella représente le matériel nécessaire au déroulement des rituels : instruments de musique, tenues multicolores et objets symboliques. Ces rituels conservent une part de mystère : les entrées aux soirées thérapeutiques sont confidentielles. Sur des rythmes et sonorités envoutantes, les transes ont lieu pendant des heures, pendant que les femmes exécutent la guedra (danse). Ce genre musical mystico-religieux répète en litanie des invocations sur des rythmes mêlant le ternaire au binaire aidant à « lâcher le mental » et à entrer dans d’autres dimensions de l’être.
EXPANSION : Le premier enregistrement de musique gnaoua au Maroc a été réalisé sur cassette audio en 1975. Au gré des échanges artistiques entre le Maroc et l’Occident, la musique gnaoua s’internationalise avec collaborations et inspirations : Jimmy Page et Robert Plant (du groupe Led Zeppelin), Bill Laswell, Adam Rudolph, et Randy Weston, Gnawa Diffusion, l’Orchestre national de Barbès. Ainsi, on retrouve des standards de la musique Gnawa, comme «Allah Allah Moulana», dans de nombreuses compositions.
2 ) La musique traditionnelle gnaoua
Musique gnawa festive, entrainante, joyeuse…
Prolongez votre bain sonore au coeur de cette musique gnawa toujours très identifiable.
S’imprégner d’un voyage musical envoutant…
Quand le gnawa se lie à d’autres genres musicaux…
La musique Gnawa enrichit d’autres styles de musiques créant des fusions Jazz-gnawa, blues-gnawa, reggae-gnawa….
3) Les instruments musique de la musique gnaoua
Les gnawas utilisent minimum 3 instruments de musique qui accompagnent les voix.
1) Le guembri
Le guembri est l’instrument central d’un groupe de gnaoua. C’est l’instrument du maâlem, le maître musicien qui est également le chanteur principal du groupe.
Le guembri, gembri, gambri, guember ou gumbri, est un instrument à cordes pincées composé de 3 cordes. On le trouve principalement en Afrique du Nord, apporté par les gnaouas, descendants d’esclaves venant de Guinée.
La particularité du guembri vient de sa facture, c’est une sorte de « basse acoustique percussive ». Sa caisse de résonance est recouverte d’une peau, et cette dernière est frappée par le musicien en même temps que les cordes engendrant un son de percussion à l’instrument. La caisse de résonance a une forme rectangulaire et peut mesurer jusqu’à 60 cm de long et 15 cm de large.
Le sintir, de plus grosse taille, qu’on trouve dans la musique extatique gnawa, s’appelle parfois lui aussi guembri. Le sintir est joué sur une seule corde mélodique, les deux autres n’étant que des bourdons jouées à vide : il prend la place d’une basse.
2 ) Les qraqeb
Nommés également karkabous, qarqabous, karkabatn qraqeshn krakeb, ces instruments à percussions de 20 à 30 cm de long produisent un son métallique, un son claquant. C’est un genre de castagnettes en métal utilisé par les gnaouas : chaque musicien utilise 2 paires (une à chaque main), créant des chocs au gré des mouvements d’ouverture et de fermeture. On peut y voir une reliance avec les crotales (instruments de percussion formés de deux plaques métalliques, employés dans la Grèce Antique et en Égypte, appelées également « les claquettes »). Joué de manière répétée, les karkabous contribuent au processus de transe. Généralement en fer battu (il existe aussi des versions en bois), les qraqeb ont la forme d’une cuillère à double embouts rassemblés par un manche. Ils font partie de la famille des idiophones. Les quatre qraqeb sont très sonores et rythment la musique gnaoui.
Des gnaouis jouant aux qraqeb (2 à gauche et 1 à droite).
3 ) Le tbel
Le tbel est un gros tambour. Utilisé pas pair, il y a souvent 2 joueur de tbel dans un groupe de musique gnaoua.
4 ) La voix
La voix du malem est souvent reprise par les autres musiciens en choeur. Cela crée la encore une répétition et une amplification répétitive avec différences de niveau sonore.
EN RÉSUMÉ, tout en conservant ses mystères, la musique gnawa a toujours su s’adapter aux situations extérieures et continue de s’ouvrir à d’autres styles musicaux et au monde tout en gardant ses racines et ses rituels de transe libératrice. A l’image de cette musique extatique, d’autres instruments et techniques offrent des états modifiées de conscience : tel le tambour chamanique, et les sons binauraux.
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